Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures
296 LE MONTÉNÉGRO CONTEMPORAIN.
Noire. À dix ans l'enfant partit pour Trieste, pour y recommencer, il faut l'avouer, par les premiers principes, son éducation : c'est à peine en effet s’il savait lire et écrire. Recu dans cette famille Kuetitch, d'où prochainement allait sortir la première princesse du Monténégro, il s'initia sans effort aux langues italienne et allemande, et acquit en quatre années un rudiment d'instruction, dans laquelle tout ce qui se raftachait à l'histoire des Serbes avait la plus large part. L'instruction bien plus pratique que théorique qu'il recevait au contact de la population si mélangée de la capitale de lIstrie, répondait mieux que toute autre aux besoins de son avenir; il retrouvait du reste, au foyer de la famille Kuetitch, la langue, la religion de son pays, et, sous les formes polies et recherchées de la civilisation, le caractère et les habitudes de sa race. Cette vie intime, longtemps prolongée dans un milieu où régnaient à la fois l'intelligence, la fortune, les beaux-arts, et jusqu'aux grâces féminines, eût élé bien propre à polir une nature rude et sauvage, à assouplir les formes vulgaires d’un montagnard étranger à toutes les recherches de l'élégance, à toutes les finesses du bon ton. Ce fut donc au grand détriment de l'éducation sociale du jeune Nicolas que son envoi à Paris, en même temps que celui de plusieurs de ses cousins, fut décidé par le prince Danilo. Ce dernier venait en effet d'entrer en relations très-amicales avec l'empereur Napoléon HI, et au nombre des marques de sympathie et de bienveillance qu'il avait reçues du potentat qui présidait alors aux destinées de l'Europe, S€ trouvait l'offre de plusieurs places au lycée Louis-leGrand, en faveur de jeunes Monténégrins désignés par le prince lui-même.