Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

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maisons désertes, agissant par conséquent en dehors de toute nécessité stratégique. Vous avez anéanti toute la récolte d'un été, le froment, le vin, l’eau-de-vie, les olives; vous avez détruit vingt-sept églises, brûlé trois monastères, renversé quatre maisons paroissiales; vous avez laissé profaner et vendre aux enchères à Budua et à Cattaro le trésor des églises. Les cadavres sont restés quatorze jours exposés à la voracité des chiens ; des milliers de femmes, d'enfants, de vieillards pleurent aujourd'hui sur les cendres de leurs demeures. Et quand saccomplissait cette inutile dévastation, on télégraphiait à Vienne : l'ordre est rétabli dans les Bouches de Cattaro. »

Comme complément de ce récit, nous exposerons encore la manière dont les insurgés avaient coutume de combattre, et par quels prodiges d'audace, d'activité et d'entente, quelques centaines d'hommes arrivaient à faire face à des corps d'armée tout entiers. Nous rentrerons ainsi pleinement dans notre sujet, car les luttes boccésiennes sont en tout point la reproduction des luttes monténégrines : dans les unes et dans les autres nous retrouverons le même pays, la même race d'hommes liers et indomptables, le même mépris du danger et de la mort elle-même, le même instinct des choses de la guerre.

Laissant à leurs sentinelles vigilantes le soin de les prévenir par des cris jetés de montagne en montagne ou par des coups de pistolet, les insurgés n'abandonnaient point complétement, au milieu de ces luttes, la culture de leurs champs ou les soins domestiques ordinaires. Mais au signal convenu et répété avec une rapidité télégraphique de village en village, de maison en maison, tout