Les complots militaires sous la Restauration, d'après les documents des archives
LA RESTAURATION ET L'ARMÉE 39
Ce qui achevait de donner à cette armée une physionomie toute particulière, c'était l'influence du cléricalisme qui est resté le caractère même de la Restauration.
On sait que, dans les idées de ce temps, la Révolution et l’Empire n'étaient que d’effroyables iniquités dont le pays devait s’accuser devant Dieu et pour lesquelles il importait de faire amende honorable. Tel fut l’objet des célèbres missions, organisées en 1816 par les abbés de Ranzan et Forbin-Janson, et qui soulevèrent dans les provinces les débordements d’une piété enthousiaste et bruyante. Dans les flots du peuple, dans le tumulte des cantiques, ajustés sur des airs en vogue d'opéras ou de vaudevilles, les missions entraînaient les préfets, les magistrats, les fonctionnaires de tout ordre et les chefs de l’armée.
On imagina d'y associer les soldats eux-mêmes. Le zèle des missionnaires fut secondé activement par les aumôniers de régiments. Ceux-ci travaillérent à combattre, parmi les soldats, l'esprit d’indifférence et d'impiété, beaucoup plus que les mauvaises mœurs ou les mauvais instincts. Les résultats furent imer-
veilleux (x).
(x) D’après Marmont, le zèle intempérant des aumôniers de fégiments obligea beaucoup d'officiers à quitter le service. Tout cela faisait dire au général Foy, le 30 mai 1821 : « Il n'y a plus de place en France que pour les prêtres et les émigrés, »