Les fêtes et les chants de la révolution française

DU 9 THERMIDOR AU 18 BRUMAIRE. 2214

mort du tyran, — si c'était en sa faveur qu'ils manifestaient, oucontre lui ». Sur quoi les modérés répondirent par le eri : « A l'Abbaye! » Mais Gossec, dont les principes étaient purs, ne voulut point rester sous le coup d'une semblable insinuation : il descendit à la barre, et prononça ce discours :

« Citoyens représentants, est-il possible qu'un doute aussi injurieux se soit élevé sur les intentions des artistes qui sont réunis dans cette enceinte, que, ceux qui ont célébré la mort du tyran, on les accuse de venir ici le pleurer? Onse livrait aux douces émotions qu'inspire aux âmes sensibles le bonheur d’être délivré d’un tyran, et de ces sons mélodieux on eût passé aux chants mâles de la musique guerrière et on eût célébré nos succès en Hollande et sur toutes nos frontières. Citoyens représentan ts, nous marcherons constamment pour eculbuter les tyrans, et jamais pour les plaindre. »

On applaudit, et la cérémonie continua sur la place de la Révolution, où l'Institut de musique joua force airs patriotiques, le Ça ira, la Marseillaise, le Chant du Dépar!, et un nouvel hymne mis en musique par Lefèvre.

En 1796, même cérémonie, commencée dans l'intérieur des Conseils, continuée au Champ de Mars. On y chanta pour la première fois le Serment républicain de Chénier et Gossec, composition importante qui, malgré les apparences que lui donne le titre, n’en était pas moins un chant d’ancien régime : ce « Serment républicain » était le serment d’Athalie, donnée précédemment par la Comédie-Française avec des chœurs de Gossec, et les vers de Chénier n'étaient qu’une adaptation des vers de Racine :

Oui, nous jurons ici pour nous, pour tous nos frères...

Si quelque transgresseur enfreint cette promesse, Qu'il éprouve, grand Dieu, ta fureur vengeresse!..