Les fêtes et les chants de la révolution française

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Jauguste cérémonie. Il y fallait faire des travaux de terrassement considérables : l'autorité, dans son évidente mauvaise volonté, n'y mit qu'un nombre insuffisant d’ouvriers. Mais sa tactique fut tôt déjouée : le peuple accourut en foule, et, malgré des résistances de plus en plus timides, entreprit de faire lui-même la besogne. Toutes les classes de la société s’y mirent avec entrain : on alla bientôt au Champ de Mars comme à une partie de plaisir. Les corporations des métiers arrivaient, marchant bannière au vent, les travailleurs portant sur J'épaule la pelle ou la pioche, armes pacifiques; un corps de musique les accompagnait, jouant le gai Ça ira égalitaire, nullement sanguinaire comme on lui en a fait à tort la réputation. « Ce chant, dit Michelet, fut un viatique, un soutien, comme les proses que chantèrent les pèlerins qui bâtirent révolutionnairement au Moyen âge les cathédrales de Chartres et de Strasbourg. Le Parisien lechanta avec une mesure pressée, une vivacité violente, en préparant le Champ de la Fédération, en retournant le Champ de Mars... Des orchestres ambuJants animaient les travailleurs; eux-mêmes, en nivelant la terre, chantaient ce chant niveleur : Ah! çaira! ça ira! ça ira ! Celui qui s'élève, on l’abaissera. »

Précisons, sans trop nous y attarder, l’histoire de cette chanson, en nous gardant de revenir sur d’inutiles réfutations de légendes, et nous en tenant aux données posilives acquises définitivement. ,

Le Çaira est un produit essentiellement parisien. L'air est celui d'une contredanse dont le titre : le Carillon national, et l'auteur : Bécourt, sont parfaitement connus et n'ont jamais cessé de l'être. Il sort donc des bals de Paris : c’est là que le peuple, ayant dansé sur son rythme alerte et guilleret, le prit un soir pour le porter le lendemain dans le champ de l'égalité labouré par ses mains.

LA FÊTE DE LA FÉDÉRATION. 19