Les fêtes et les chants de la révolution française

VIII

dans lesquelles la Révolution française est contenue, j'ai cherché à me rendre compte si la musique d’une part, l'esprit populaire de l’autre, ne pourraient trouver un mutuel profit à se pénétrer l’une l’autre, et surtout si l’art d'aujourd'hui — pour mieux dire celui de demain — ne trouverait pas une base solide en cherchant son inspiration dans un idéal semblable à celui des hommes de la Révolution. Grave problème, dont on ne peut songer à apporter la solution aujourd'hui, mais qu'il importe de poser.

Retracer l’histoire d’une musique faite à l'usage d’un culte, c'est écrire un chapitre d'histoire religieuse. J'apporte donc une contribution, si indirecte soit-elle, à ce qu'on a appelé justement « l’histoire religieuse de la Révolution », sujet qui, en ce moment même, préoccupe d'excellents et éminents esprits. Laissant à ceux-ci le soin d'approfondir les doctrines, je dois (à chacun sa tâche) me borner à considérer l’extériorité des manifestations produites par cette religion civique, et déterminer le rôle que l’art y joua. Et c’est, pour préciser encore, un chapitre d'histoire de la musique religieuse que j’apporte. Musique toute différente de celle des diverses confessions reconnues : il n’y faut pas chercher trace de grégorianisme, non plus que Palestrina ou le choral luthérien n’ont à y voir quoi que ce soit; mais songeons que nous sommes au xvu° siècle finissant : c’est la musique religieuse telle qu'on la pouvait alors concevoir que vont nous révéler les hymnes de Gossec, Cherubini, Méhul, Lesueur. Cela est si vrai que lorsque ces maîtres ont écrit (tous l’ont fait) des messes, des motets, des cantiques, ce fut dans un style presque semblable à celui des chants que leur avaient inspirés les strophes de Chénier. Avec des nuances, cependant : l'allure de cette liturgie révolutionnaire, même dans ses pages les plus intentionnellement imposantes, est moins contemplative et moins passive que celle des compositions faites expressément pour l'église. Les rythmes ont plus de vivacité. Ils invitent à la marche en avant. Ils indiquent que la religion moderne est une religion d'action. Dans ces spectacles qu'offre le culte de la patrie, quand