Les Préfets du Consulat et de l'Empire

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écrire en ce sens et parut très mécontent. Au fond, tout cela était combiné entre Lucien Bonaparte, Rœderer, Beugnot et quelques autres, et le Premier Consul n'était pas sans en être informé.

Dès lors, ce fut en toute connaissance de cause que les préfets continuèrent à orienter vers l'Empire l'opinion docile du pays. Ils étaient pris dans l’engrenage. S'ils furent irrités ou humiliés du rôle qu'on leur faisait jouer, ils ne le firent pas voir, mais quelques-uns d’entre eux ne pouvaient s’empêcher de se dire avec amertume : « Voilà donc où ont abouti tant de beaux discours, tant de nobles pensées, tant de glorieux exploits. Est-ce donc pour retourner sur ses pas que la nation s’est lancée dans une carrière nouvelle? Que sont devenues tant de promesses, de serments, de vœux et d’espérances ? Nous ne sommes donc plus que des esclaves révoltés à qui l’on fait reforger, de leurs propres mains, les chaines qu'ils avaient brisées ? (1) »

{1) Thibaudeau : Mémoires sur le Consulat.