Lettres sur la révolution française : par J. Gorani, citoyen français, à son ami Ch. Pougens

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lie, puiffance la plus dangereufe par fa vafte ambition, qui ne tend à rien moins qu’à envahir toute l’Europe. La Ruffie, en trompant PAutriche, comme elle l’a fait fi fouvent, fe réuniroit avec elle contre vous, comment pourriez-vous rélifter à ces deux ennemis? Et quelle puiffance pourroït voler à votre fecours, lorfque la France & Ja Pologne feroïent ruinées ? Il eft donc de là plus grande importance pour vous, fire , que vos Etats reftent féparés de ceux de la Ruffie par une puiffance neutre, telle que la Pologne , affez forte pour être votre alliée utile, & pas affez pour vous inquifter. 31 importe qu'entre la Pruffe & la Ruffie il exifte , comme entre celle-ci & la Chine, un grand efpace qui puifle fervir de barrière à l’infatiable ambition du cabi. net de Pétersbourg.

D’aïileurs, dans ce nouveau partage de a Pologne | vous n’auriez, fire, vraifemblablement que la moindre portion , & quelle que fût celle qui vous échoiroit , eHe ne vous donneroit pas de forces fuffifantes pour réfifler , je ne dis plus à ces deux puiflances réunies contre vous , mais feulement à une feule des deux.

Permettez-moi de vous obferver , fire, que fe rapport de vos forces à celles de la Ruflie, eft comme un à cinq, puifque la Ruflie a 30 millions d’habitans, & que le rapport entre vous & FPAutriche , eft comme un à trois & demi, puifque la population des Etats Autrichiens eft de 19 à 20 millions d’habitans, & que les revenus de cette couronne font de 94 millions de floxins. Or, fi en partageant la Pologne, ces rapports reftent les mêmes, & fi, comme if ya lieu de le craindre, ces rapports devenoient plus fâcheux pour vous, ïl yauroit raifon de prévoir que votre puiffance difparoïtroit