Marat inconnu : l' homme privé, le médecin, le savant : d'après des documents nouveaux et inédits

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Alors le jugement s’égare, et l’on a cette charge pas trop fantaisiste : (1) « Quoi ! c'est là Marat! Cette chose jaune, verte d’habits; ces yeux gris-jaune si saillants !.. C’est au genre batracien qu'elle appartient à coup sûr plutôt qu'à l'espèce humaine, De quel marais nous arrive cette choquante créature ?.. Son front jaune, son vaste rictus de crapaud souriait effroyablement sous sa couronne de laurier... »

Certes, Marat n'avait ni les traits d’Alcibiade ni le profil d'Antinoüs. D'une taille exigüe, la tête enfoncée dans les épaules, le plus souvent inclinée sur le côté droit, il marchait le dos légèrement courbé, ou plutôt, s’il faut en croire un de ses contemporains (2), il sautait plutôt qu'il ne marchait.

Taillé en sapajou (3), il paraissait peu fait pour plaire, et pourtant il savait parfois trouver le secret d'être séduisant. Sans être sympathique il était d’une particulière attirance.

Pour fixer son opinion on n’a qu'à s’en rapporter au portrait qu'en traçait un homme qu'on ne peut cependant pas suspecter.

Voici comment nous le peint, dans une brochure devenue rare, le conventionnel Fabre

(1y Michelet, Hist, de la Rév. franc. (2) Anecdotes sur la Révolution par Harmand (de la Meuse), (B)Brissot, Mémoires, t. I, 347. =