Mémoire sur la Bastille

ANECDOTES ET CITATIONS 257

« Trois canons, dirigés contre les assiégeans, étoient prêts à balayer la cour. Environ trente-six petits Suisses sous les armes attendoient l’attaque; joignez-y douze ou treize invalides commandés par quatre officiers, deux canonniers et les officiers de l'état-major.

« Quoique seul dans cette dernière et formidable enceinte, M. de La Rosière les somme tous de changer la direction des canons et de se rendre: cette sommation, il la fait au nom de l'honneur, au nom d’un peuple souverain.

« Le gouverneur engage tous les officiers, tous les soldats, à jurer qu’ils ne tireroient pas les premiers, et il le jure lui-même.

« Cela ne suffisoit pas à M. de La Rosière: il veut monter sur les tours, y visiter les canons, se promettant bien qu’après en être descendu il trouvera la garnison prête à remplir ses devoirs de citoyen.

« Le gouverneur résiste ; les officiers le pressent ; il se rend et suit M. de La Rosière.

« Parvenus au sommet de la tour qui domine l’Arsenal, ils découvrent un peuple immense accourant de toutes parts et le faubourg Saint-Antoine qui s’avançoit en masse.

« Le gouverneur en pâlit. Saisissant M. de La Rosière par le bras: « Que faites-vous, Monsieur? « Vous abusez d’un titre sacré pour me trahir !—

Mémoires sur la Bastille, 33