Observations du comte de Lally-Tolendal sur la lettre écrite par M. le comte de Mirabeau au Comité des recherches, contre M. le comte de Saint-Priest, ministre d'État

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Mais dépend-il de moi d'entendre ou de ne pas entendre ? Et G , par cela feul que jai entendu , il étoit vrai qu’il fallûe répéter, répéter publiquement ; fi j’alloisvous préduire ici cette fuite de longs & nombreux our dire ; quelqu’étranges , quelque déchirants qu’ils puffént être pour vous , fuffentils auf injuites que terribles, qu’en arriveroit-il? Vous _mieriez ? que m'importe ? Vous exigeriez des preuves ? Vous m'avez dit que je ne devois pas m’en embarrañer. Vous me demanderiez ce que j'ai fait de ces fcrupules! qui vous ont fi long-temps amufé ? Vous avez voulu m’en délivrer , vous m'avez fait un devoir de les vaincre ; vous m'avez annoncé que mon /ilence feroit un crime. Vous n’auriez pas un mot à medire, qu'un autre mot de vous n’eût déjà détruit. Vous n’imagineriez pas un reproche à me fre, duquel vous ne m’eufliez purgé d’avance. Partout je vous oppoferois à vous-même ; partout je vous répéterois ce qu'on difoit au fameux Poyet: Subiffez la loi que vous avez faite. Patere legem quam ipfe tuleris.

Tous LEs sOUPçONS! ..... Et qu’eft-ce donc qu’un foupçon ? Eft-ce un aëte volontaire ? peut-on en répondre? Lorfque , dans la matinée du $ otobre , vous nous parliez de lorgte imprudente du 1°* ; lorfque vous difiez qu’elle Pétoit « d'autant plus qu’on pouvoit craindre qu’elle » n’en produisit d’autres en fens contraire ; lorfque vous » laifiez à deflein ; ce font encore vos termes, quelque »») ambiguité fur ces paroles ; & lorfque , trois heures après, on Zoyoit l’ambiguité difparoître , votre crainte fe réalifer & l’orgie commencer, lorfque, dans cette méme matinée, vous nous glaciez d’effroi par les dénonciations dont vous nous menaciez, & lorfque les deux perfonnes défignées par vous à l’aflemblée entiere, nommées par vous avec fureur à toute la partie de laffemblée qui vous environnoit , étoient menacées & fauvées par muracle dans l'orgie de la nuit; étois-je maître, dites-moi, du /ozpcon qui venoit s'emparer de ma penfée, qui me faifoit involontairement rapprocher vos difcours du matin des évenements du foir , qui me faifoit dire audedans de moi: « Voilà ’éincelle & voilà Pincendie? » Mais j’étois maître du moins de renfermer ces foupçons, de les combattre ; mais je pouvois men faire une vertu, une religion. Et vous venez me déclarer que, fi je ne les communique pas, je fuis un crérzinel, je fuis un zmpre ! & vous me le déclarez au nom de la patrie , au nom de