Orateurs et tribuns 1789-1794
L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA MONTAGNE. 275
Hérault a vu l'avocat Gerbier se mettre devant un buste et lui plaider sa cause, comme devant un auditoire : il tient de l’acteur Larive qu'il fallait devenir supérieur à sa mémoire, de Jefferson qu’il n’avait jamais pu retenir les choses qu'en masse.
Il avait pris des lecons de mademoiselle Clairon. « Avez-vous de la voix ? » lui demanda-t-elle, la première fois qu’il la vit. Un peu surpris de la question, il répondit : « J'en ai comme tout le monde, mademoiselle. — Eh bien! il faut vous en faire une. » Voici quelques-uns de ses principes : « Il y a une éloquence des sons. S’étudier surtout à donner de la rondeur à sa voix; pour qu'il y ait de la rondeur dans les sons, il faut qu'on les sente réfléchir contre le palais... La variété des infonations fait le charme de la diction. Par-dessus tout, se bien pénétrer de ce qu’on veut rendre. Que voulez-vous être? orateur, soyez-le partout, dans votre chambre, dans la rue. Rien n’est plus fort que l'habitude; elle vient à bout de tout... Teindre les mots du sentiment qu’ils font naître. »
Hérault affirme qu'il y a dans le discours, comme dans la musique, une sorte de mesure des tons qui aide à l'esprit, qu'il faut parler sa voix, c’est-à-dire la prendre dans le milieu, avoir l'air de créer ce qu’on dit et commander ses paroles. L’idée qu’on parle à des inférieurs en puissance, surtout en esprit, donne de la liberté, de l’assurance, de la grâce même. Il avait vu d’Alembert habitant une sorte de taudis, entouré de