Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

9f CONVENTION

Mais est-il bien sûr qu'au moins, dans l'origine, tous ceux qu'ils faisaient arrêter comme suspects, ils les eussent déjà promis à l’échafaud ? Oui, les tyrans avaient déjà cette pensée toute entière. Ils ne voulaient l'annoncer que par degrés. Ils eussent fait frémir plusieurs de leurs complices, ils eussent révolté plusieurs de leurs agens. À /a montagne même siégeaient des hommes violens, mais susceptibles de pitié, chez qui de tels projets eussent hâté le repentir et la vengeance qu'ils devaiént au genre humain. Cependant le furieux Collotd'Herbois trahit un jour dans la convention le sort réservé à ces milliers de suspects. Barrère venait de proposer contre eux une loi de déportation : c'était au climat dévorant de la Guiane qu'il envoyait tous ceux que même les tribunaux révolutionnaires n’osaient encore juger coupables. Vous eussiez dit, à la colère de Collot-d'Herbois, que son collégue venait d’invoquer et de venger l'humanité. « Qu'ils tremblent » dans leurs prisons , s'écria-t-il, ces lâches ennemis de la pa» trie! qu’ils tremblent sur-tout si nous éprouvons encore les » revers dont ils font leur joie! Il faut qu'une mine soit prati» quée sous leurs prisons , et qu'à l'approche des brigands » armés qu’ils appellent leurs libérateurs, une étincelle salu» taire, jétée sur la mine, mette en poudre les conspirateurs !»

La convention frémit de terreur, et même d’horreur. Les prisons ne furent point minées. Il est vrai que les armées étrangères ne firent point en France de progrès ultérieurs.

Le signal fut donné au tribunal révolutionnaire de faire tomberses coups sur destêtes illustres. Il n’avait encore frappé que des personnes obscures, et presque toutes choisies dans la classe même que les démagogues flattaient sans cesse. Dans les mois de septembre et d'octobre, le comité de salut public lui livra successivement à condamner le général Custine, la veuve de Louis XVI, et vingt-deux députés du parti de la Gironde.

Le supplice de Custine fut le dernier crime auquel Danton prit part. Dans son aveugle soumission aux lois de la république, le général, muet sur la journée du 31 mai, ne l'était pas sur ses auteurs. Qu’ai-je besoin de parler des torts dont il fut accusé? Toutes ses opérations militaires furent soumises à l'examen de juges et de jurés qui avaient vu plus de massacres que de combats. L'embarras était moins pour lui de se justifier que de se faire comprendre, Il est des hommes dont la destinée est de rencontrer partout des ingrats; et ce sont ceux-là sur-tout qui, comme Custine, sont confians par excès de présomption, Il trouva des accusateurs parmi tous ceux dont il avait fait la fortune. Un guerrier qui lui devait son avancement, le général Houchard, vint déposer contre lui