Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3
214 DIRECTOIRE
la matière des bubons, et se guérit par les mêmes remèdes qu’il ordonne pour eux. Le chirurgien en chef, Larrey , se montre le digne émale de ses vertus civiques. Déjà le mal le plus effroyable est conjuré , l'armée a franchi le désert, des armées d’Arabes ont été dispersées, plusieurs de leurs tribus ont expié leurs brigandages. Les soldats rentrés en Egypte éprouvent , en embrassant leurs anciens compagnons, les mêmes émotions que s'ils se revoyaient au sein de leur patrie. On se communique avec une profoude tristesse les nouvelles qu’on a recues de cette patrie qu’on a laissée si chargée de victoires et de conquêtes. La renommée a déjà répandu les nouvelles des revers des armées d'Italie et d’ALlemagne. On ne connaît pas encore tous les malheurs , mais Bonaparte peut les pressentir, parce qu’il a déjà jugé les fautes qui ont été commises. Dans toutes les lettres qu'il a reçues on implore son retour. Les progrès de l’anarchie lui sont fidèlement représentés. Les rapports les plus exacts lui font entendre que les républicains français, fatigués de leurs magistrats , qui se succèdent sans leur inspirer ni confiance ni respect, fatigués de leurs lois, qui ne se multiplient que pour s’entre-détruire, ne sont plus disposés qu'à reconnaître une seule autorité, celle d’un grand nom. L’imagimation le reporte vers ses armées qui se retirent des bords de l’Adige du Danube et du Rhin. Du sein de l'Egypte , il trace des plans de campagne dont le théâtre est en Italie ; mais il ne peut laisser sa dernière conquête que bien assurée , et son armée que triomphante, Combien il lui tarde que les ennemis viennent lui offrir cette occasion de victoire et de sécurité! 11 compte les jours où le débarquement des Turcs lui a été promis : toute sa crainte est que les ennemis n’emploient pas à cet effort la plus grande partie, et sur-tout l'élite de leurs forces ; un triomphe incomplet contrarierait autant ses des “seins que l’absence d’un triomphe. Quelques jours lui ont suffi pour repousser vers le désert Ibrahim-Bey, qui, dePuis son retour de la Syrie, a osé s’avancer vers les Pyramides, et Mourad-Pey, qui, chassé de bourgade en bourgade dans la Haute-Egypte, par les continuels exploits du général Desaix et du général Davoust , est parvenu , en dérobant sa marche , à gagner l'Oasis du lac Natron et celui de Sabahiac. Le général Lagrange , et bientôt le général Murat, ont surpris le camp de ce dernier, et ont taillé son armée en pièces. À ces mouvemens hardis des Mameloucks , Bonaparte ne doute plus que le débarquement des Tures ne soit près de s'effectuer. Il apprend , par une lettre d'Alexandrie , que cent voiles turques ont mouillé le 24 messidor (13 juillet) à Aboukir , qu'ils ont assiégé le fort et s’en sont rendus maî-