Quelques lettres de G. -H. Dufour (1813-1815)
À Monsieur Baudrand, colonel du génie françcais, Messine (Sicile).
Corfou, le 27 juillet 1813.
Mon cher colonel,
Puis-je espérer que ce petit bout de lettre vous parvienne ? Vous êles actuellement si éloigné de nous que nous présageons de grandes difficultés pour la correspondance ; nous les présageons avec d’autant plus de fondement que, des nombreuses leitres qui vous ont été écrites, aucune, à ce que nous craignons, ne vous est parvenue. Dans quel état vous devez être pour celte seule raison! Je ne crois pas cependant que vous ayez pu douter un moment de l’attachement de vos amis. vous les connaissez trop bien pour cela; j'ai vu souvent couler de leurs yeux des larmes amères, j'ai souvent mêlé les miennes aux leurs ;: pardonnez-le moi, mais, en vous perdant, je me suis vu privé d’un père, bien plus que d’un chef; toutes les bontés que vous m'avez témoignées me seront toujours présentes et seront pour moi la source de bien des regrets. Cependant, je n’ai point encore perdu l’espérance de vous revoir ; je crois que vous serez promptement échangé el qu’alors vous voudrez bien m'appeler à servir sous vos ordres.
Vous avez bien raison d’envier mon sort: vous gémissez en captivité, tandis que je suis à Corfou et presque guéri; j'ai beaucoup souf-