Rouget de Lisle : sa vie, ses œuvres, la Marseillaise

— 107 —

« Depuis six mois, les Bataves poursuivent la restitution d’un trésor de six à sept millions qui leur a été enlevé avec toute l'astuce et toute l’audace du brigandage. Ils le réclament au nom du droit des gens, au nom d’une garantie précise et ad hoc du gouvernement français, au nom des titres les plus sacrés de la propriété; ils le réclament comme un aliment nécessaire à leur industrie expirante, à leur crédit épuisé, et cependant si nécessaire encore à vos propres besoins! Que le Directoire soit demeuré sourd à leur réclamation, rien de plus naturel. La part était meilleure en refusant justice qu’en l’accordant. Mais vous, citoyen consul, vous qui connaissez à fond cette affaire du Coëningholm, vous qui, du premier coup d'œil, avez dû la juger ce qu’elle est, c’est-à-dire une affaire de gouvernement à gouvernement, une affaire que, par conséquent, vous pouvez et devez terminer d’un mot, commentse fait-il que vous la laissiez en souffrance, que vous exposiez cette immense cargaison à devenir la proie des vers et des voleurs, et que vous vous exposiez à devenir vous-même, sans Le savoir, le jouet de l’intrigue et l'instrument de la spoliation?

« Une des dispositions les plus propres à calmer, à ramener les esprits bataves, c’eût été le rappel des principaux agents français et leur remplacement bien dirigé !

«Je ne parlerai point de la nomination de l’ambassadeur dont je m'étais d’abord réjoui pour eux, et contre laquelle je n’ai d'autre objection que les faits relatés cidessus. « Mais Augereau, le général Augereau ! Vous avez à redresser les griefs d’un peuple jaloux à l'excès de ses propriétés, et vous lui envoyez Augereau que, depuis si longtemps, la voix publique désigne pour n’en respecter aucune !