Rouget de Lisle : sa vie, ses œuvres, la Marseillaise

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bailleur de fonds et l'organisateur se brouillent et Rouget reste, comme précédemment, sans ressources et sans emploi.

« Ce qu'il y a de pire, dit-il, c’est que leur amitié « pour moi et la mienne pour eux ne m'ont point « permis de faire retraite dès le principe, comme la « prudence me disait de le faire. Confident de tous les « deux, je me suis trouvé entre l’enclume et le marteau, « tout en mâchant à vide. Cet état de chose a duré deux « mois. Comme il ne pouvait aboutir à rien, pour les

uns, ni pour les autres, force à été d'y mettre un terme. « Je l'ai fait, mais alors je me suis trouvé vis-à-vis de « rien, absolument de rien, pas même d’espérances. « Vingt fois j'ai pris ma canne pour m'en aller droit € devant moi, aussi loin que je pourrais aller, et tomber € au bout. Qui m'en a empêché? je serais bien embar« rassé de le dire. Enfin, mon ami, enfin... le hasard « me donna connaissance d’une entreprise d'assurances « contre les incendies, qui embrasse les huit dépar« tements autour de Paris, qui réunit les principaux « banquiers de la capitale et à la tête de laquelle se € trouve M. Lafitte. »

Cette société c'était celle du Phénix. Appuyé par Manuel qu'il connaissait, il est présenté à M. Lafitte qu'il connaissait aussi et qui lui promet une occupation dans l'entreprise. L'autorisation royale est accordée, et Rouget soupire enfin d'aise à la perspective d’une vie moins malheureuse. Il espère avec son emploi habiter la chaumière qu'on lui destinait dans l’organisation des Jeux chevaleresques. En attendant la prise de possession d'emploi, par l'entremise de son ami Weiss, il fait la connaissance de M. Barbier, bibliothécaire du roi. Plein d’obligeance, M. Barbier met à la disposition de