Rouget de Lisle : sa vie, ses œuvres, la Marseillaise

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bien compris et il a très judicieusement apprécié notre auteur dans une lettre écrite à M° Voïart, à cette femme dévouée qui a donné à Rouget les soins les plus tendres et les plus assidus pendant sa dernière maladie.

Béranger va donc encore venir à notre aide pour faire connaître et apprécier l’auteur dont nous avons entrepris de faire comprendre la vie et les œuvres. Voici cette lettre écrite immédiatement après la mort de Rouget, c’est-à-dire au mois de juin 1836 :

« C’est avec bien de la douleur que j’ai reçu la triste nouvelle de la fin de notre ami. Je ne pouvais sans doute me dissimuler, d’après les détails que vous et M. Voïart avez bien voulu me transmettre, que la mort approchait du vieux poète, maisje ne lacroyais pas si près d’éteindre une existence précieuse à l’amitié, et qui laissera une trace lumineuse jusque dans la postérité la plus reculéef. « Je l’avais connu bien malheureux: nous avions eu bien de la peine à lui faire atteindre l’époque qui devait le sauver de la pauvreté si longtemps à sa porte. L’excellent général Blein a droit à la reconnaissance du pays pour tout ce que sa vieille amitié lui fit faire pour préserver Rouget de Lisle du désespoir. Il ne trouva pas moins d’adoucissement à ses peines auprès de vous, madame, et quels que soient les avantages que lui procura 1830, ils auraient été insuffisants pour son bonheur, sans cette continuité de soins dont vous avez comblé ses dernières années. Rouget de Lisle n’était pas de ces hommes qui peuvent vivre ni mourir seuls. C’étail l’artiste resté enfant. Je me suis souvent dit qu'une femme intelligente et dévouée, partageant sa vie, lui eût appris

4. Béranger pouvait penser alors à sa belle chanson, Les Eloiles filantes.