Rouget de Lisle : sa vie, ses œuvres, la Marseillaise

PT

« Citoyen ministre,

« Vous vous rappelez, sans doute, les motifs qui me guidaient lorsque je sollicitais près de vous l'honneur d’être mis sur les rangs pour reconduire Mademoiselle de Bourbon, et les formes sous lesquelles cette proposition vous fut présentée.

« Vous vous rappelez, sans doute aussi, que je vous laissai entièrement le juge des convenances qu’il m’était impossible de caleuler; et que l’unique intérêt que j’attachasse à cette mission, était le désir d’adoucir, par les procédés d’un homme honnête et sensible, le sort et l’exil d’une malheureuse enfant, et de lui épargner, au moins dans cette dernière circonstance, les atrocités gratuites depuis si longtemps exercées contre elle.

« La preuve que des intentions si pures furent énoncées comme elles devaient l'être, c’est que vous les accueillites avec plaisir et que vous n’avez pas craint de vous en rendre l'interprète auprès du Directoire.

« Je ne reviendrai point sur la défaveur avec laquelle on les y a reçues, sur les inculpations, les déclamations qu’elles y ont excitées contre moi, si je n’apprenais qu’on cherche aujourd’hui à leur donner une nouvelle consistance, et à faire de ma demande le prétexte d’une nouvelle proseription, pour s’indemniser sans doute de ce que celle qu'on me suscita sous Robes n’a pas produit son entier effet.

« J'en appelle à votre loyauté, citoyen ministre : elle vous suggérera, sans doute, de me fournir le moyen de confondre la malveillance qui me poursuit. Il suffit pour cela d’un mot de votre main qui rende hommage à la vérité : je vous connais trop bien pour douter de votre empressement à me l’accorder.

« Agréez ma respectueuse considération, »