Souvenirs de Russie 1783-1798 : extraits de journal de Mme Leinhardt

SOUVENIRS DE RUSSIE 15

A en juger d'après les récits de Ml!* L., la grande Catherine était partout ce qu'elle voulait être. « Vous l'avez vue à la mascarade et vous en avez été enchanté; mais, à la messe, vous auriez admiré son air de dignité, de piété, de recueillement, joint à une grâce noble que vous avez jugé ne devoir jamais la quitter, même dans les actions les plus ordinaires de la vie. Pendant la messe, une fenêtre s'était ouverte derrière elle, les pages voulaient appeler quelqu'un pour la fermer, mais elle leur fit signe de ne pas bouger et, se retournant, la ferma elle-même. » Et Mi: L. ajoute : « Je connais bien des dames qui n'en auraient pas fait autant. »

Le 13 avril 1784, Mie L. eut le plaisir de voir passer l'Impératrice suivie de tous les carrosses de la Cour. « Elle se promène ordinairement ainsi durant les fêtes de Pâques pour se faire voir au peuple. Il y avait une grande multilude qui bordait les rues et se prosternait la face contre terre au moment de son passage, tandis qu'elle saluait gracieusement à droite et à gauche. Un instant après, le grand-duc passa à cheval et Madame en carrosse. Ils étaient aussi suivis des personnes qui composent leur Cour. »

Le jour de Pâques, la foule des grands seigneurs et des beaux équipages se promenait sur le quai de la Néva. L'Impératrice s'y promenait aussi à pied, avec sa petite société. « Elle marchait seule cependant et se retournait de temps en temps vers les messieurs de sa suite. D'abord après la grande dame venaient plusieurs seigneurs, mais seulement deux laquais. Elle était mise en simple robe brune et coiffée d'un très petit bonnet. »

Pendant le carême, l’Impératrice faisait chaque semaine une partie en traîneau soit à Pella, soit à Tschesmé, où l’on dinait; puis on revenait droit à l'Hermitage, où l’on s'amusait aux petits jeux toute la soirée. On disait que c'étaient les jeunes grands-ducs qui sollicitaient leur grand'maman pour ces parties.

A la date du 10 septembre 1790, Mie L. raconte longuement la fête de l'ordre d'Alexandre Neffski et le transport des reliques de ce saint de la vieille à la nouvelle église. « L'Impératrice y était avec le cortège le plus splendide. Dans le cortège se trouvaient les deux jeunes grands-ducs Alexandre et Constantin. L’aîné me parut