Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

CAMPAGNE DE 1807 : EYLAU, FRIEDLAND 14111

Benningsen faisait encore résistance vis-à-vis de l'Empereur, séparé de l'ennemi seulement par un ravin, et nous éprouvions des pertes de ce côté. Toutefois, l'Empereur ayant battu l’armée ennenemie sur les autres points, elle se retira vers le soir. « Mais, disait l'Empereur, Benningsen est pris; sa retraite n'est possible que par Wehlau, et là, il rencontrera Murat. » L'Empereur vint voir le maréchal, l'embrassa et le complimenta sur le coup de main hardi qu'il avait exécuté. Dans cette affaire, le brave général Marchand se couvrit aussi de gloire.

Le lendemain, nous marchâmes sur Wehlau à la poursuite de Benningsen. Mais Murat, désireux de gagner Kœnigsberg, s'était élancé vers cette capitale, et Benningsen put effectuer sa retraite par le pont que nous trouvâämes coupé à notre arrivée. Ney m'ordonna de chercher un gué dans la rivière. Je suivis le cours pendant quelques instants, et, apercevant quelques petites vagues, je me persuadai qu’elles couvraient un bas-fond où nous pourrions passer. Je fis approcher mon cheval du bord; je le piquai, il se jeta dans l’eau, et bientôt, baigné jusqu’à la ceinture, je fus forcé de l’abandonner au courant; il rejoignit l’autre bord à la nage. Je revins au pont par l’autre rive, convaincu qu'il n'existait aucun gué, et je retournai vers le maréchal par le pont, lorsqu'il fut rétabli. On se remit bientôt en avant à la poursuite de l'ennemi, trop loin de nous pour être atteint.