Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

166 SOUVENIRS D'OCTAVE LEVAVASSEUR

qu’un jour, le 11 mai, le maréchal Soult étant à table, on vint l’avertir que les Anglais débarquaient leurs troupes; qu'il fit d’abord peu d'attention à cette nouvelle; qu’on vint de nouveau lui dire que le débarquement continuait et qu'alors seulement il envoya un aide de camp pour reconnaître ce qui se passait, mais que bientôt une fusillade se fit entendre dans les rues de Porto; que la ville se souleva et que les soldats, abandonnés à euxmêmes, ne purent que fuir devant la multitude qui les poursuivait. Traversant les broussailles et les bruyères, afin d'éviter les chemins devenus mortels pour eux, ils étaient parvenus à grande peine à la frontière, et c’est dans cette situation épouvantable qu’ils étaient arrivés à Orenza, d'où ils avaient gagné Lugo, le 22, sans être ralliés par personne.

Plusieurs chefs de cette armée en déroute mettaient en question que Soult, en prenant la détermination de se déclarer prince indépendant, eût suivi les ordres de l'Empereur; ils parlaient tout bas de faire arrêter ce maréchal; mais Soult, ayant dépêché son aide de camp Brun de Villeret auprès de Napoléon, et le maréchal Ney, de son côté, ayant envoyé l'officier à marcher vers l'Empereur, les bruits relatifs à cette affaire s'apaisèrent aussitôt. Le lendemain, Soult, ralliant les restes de son armée, se dirigea vers Madrid par Salamanque. Il est donc permis de penser que l'Empereur avait dit à Soult, au moment de son entrée