Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

252 SOUVENIRS D'OCTAVE LEVAVASSEUR

celant; il gagne, selon son usage, la muraille, sur laquelle il s'appuie. Bientôt, on s’avance vers lui; . on se récrie sur le mot octroi, qui semble annihiler la situation de la France vis-à-vis de son gouvernement. « Monseigneur, lui dit-on, où en sommes-nous? Que veut dire ce langage? Comment! C’est le roi qui fait présent à ses peuples de la Charte constitutionnelle? Qu’avons-nous donc conquis à la Révolution? Que reste-t-il de nos droits? Ceci renverse nos idées et change du tout au tout notre position politique. » Le prince, prenant un air indifférent et piteux : « C’est une concession, dit-il, que le principe de légitimité entratnait; cela n’a pas grande importance. » — « Mais, Monseigneur, la différence est grande pourtant. La Charte n'offre plus aucune garantie; sur qui repose-t-elle? Elle n’a donc de base que l’autorité royale? Monseigneur, si le roi nous l’accorde, en vertu des droits qu’il prétend avoir, lui ou ses successeurs pourront la retirer en vertu des mêmes droits. Ce n’est pas ce qui avait été convenu à Saint-Denis : le roi avait positivement accepté cette Charte et, aujourd’hui, c’est lui qui nous la donne. » — « Que vous importe? réplique Talleyrand, si la Charte est rigoureusement observée; je n’aperçois vraiment pas les inconvénients dont vous parlez; il n’y a pas grand mal à tout cela; la légitimité est un ancien principe auquel il fallait bien accorder quelque chose. »

Le prince, obsédé, quitta son point d'appui en