Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

254. SOUVENIRS D'OCTAVE LEVAVASSEUR

Nous n’étions pas libres de ne pas aller aux Tuileries : s’abstenir, c’eût été faire acte de mécontentement, et le maréchal tenait à montrer la franchise de son adhésion. Dans les présentations, le vieux prince de Condé n’était point oublié. Ancien chef de l’armée de Coblentz, c'était autour de lui surtout que se groupait cette nuée d'officiers improvisés, dont je viens de parler.

Quant à son fils le duc de Bourbon, retiré à Chantilly, il ne s’occupait que de chasser. Sa forêt fut bientôt repeuplée de sangliers, qui venaient jusque dans les bois environnant Breteuil. Précédé de ses meutes immenses, il s’en allait, lui-même, y traquer ces bêtes fauves. Partant dès l’aube de Chantilly, il arrivait de bon matin à Breteuil, où tout était préparé pour le recevoir; mais il entrait rarement dans le bourg, enfourchait son cheval et se dirigeait vers les bois où les limiers l’attendaient. À son arrivée, on lâchait la meute, et bientôt, galopant au son du cor, il suivait la chasse à travers les halliers. Des relais de chiens et de chevaux attendaient le sanglier à sa rentrée dans les bois voisins, car souvent l’animal débouchaïit dans la plaine et, sur son passage, éventrait nombre de chiens. On forçait enfin la bête vers la fin de la journée; le prince lui donnait le coup de grâce. Souvent la nuit était venue et il fallait rejoindre Breteuil comme on pouvait. Un jour, le prince égaré me rencontra et, marchant près de lui, je servis de guide jusqu’à Breteuil. Pendant le trajet,