Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

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frotté à terre, devient presque indéchiffrable, en sorte que je suis obligé d’aider à sa lecture. Retourné auprès du maréchal Ney, je le trouve en arrière de la Haye-Sainte. Déjà le comte d’Erlon avait commencé son mouvement d'attaque, la bataille était engagée. Le maréchal fit appeler tous les colonels de cavalerie et leur donna l’ordre de lui envoyer chacun un escadron. Ces escadrons étant venus se former derrière lui, il dit à un de ses plus anciens aides de camp, Crabet, général de brigade en retraite, revenu depuis quelques jours auprès de lui, de prendre le commandement de cette cavalerie, et il ajouta : « Vous allez suivre par la gauche et balayer tout ce qui se trouve entre l'artillerie ennemie et son infanterie en passant sur le terrain occupé par l'ennemi derrière la HayeSainte. » Pendant ce temps, le comte d’Erlon s’avançait au milieu de la mitraille sur la pente du plateau, mais il ne réussissait pas à prendre la position. Crabet défile et s'enfonce dans le vallon; le maréchal se retourne et s’adressant à moi

« Levavasseur, dit-il, marchez avec cette charge. » Je pars et je rejoins Crabet en avant. Après avoir dépassé les lignes d'artillerie ennemie, Crabet se forme en colonne par escadron et commande la charge. Nous nous lançons en poussant les cris de « Vive l'Empereur! En avant! » Devant nous se sauvent tous les chevaux d'artillerie, abandonnant leurs pièces. L’infanterie même paraît obéir à ce mouvement et bat en retraite : pas un coup de fusil