Trois amies de Chateaubriand
MADAME RÉCAMIER 451
la belle Nathalie, mais pour la belle Juliette; et : Juliette frémit aux aventuresde Blanca, sans deviner rien, Le lecteur, lui, saït tout cela, y songe et, si je ne me trompe, goûte l'amusement de ces diversions:
La lecture eut un superbe succès. Il y avait Mme de Staël, laquelle, comme en 1801, voit la rencontre de Juliette et de René; il y avait Bernadotte, Macdonald, Wellington, la duchesse de Luynes, Camille Jordan, Ballanche et « une élite empruntée à toutes les sociétés de l Europet ».
René lut « de la voix la plus touchante et la plus émue », avec « cette foi qu’il a pour tout ce qui émane de lui », dit la méchante et spirituelle comtesse de Boigne. Et il entrait si bien dans l’'émouvante réalité de cette anecdote amoureuse que « les larmes tombaient sur le papier ». Les dames partageaient ce vif émoi. Puis, la lecture finie, on apporta le thé... « Monsieur de Chateaubriand, voulez-vous
du thé? — Je vous en demanderai.… Aussitôt un écho se répandit dans le salon : — Ma chère, il veut du thé, — Il va prendre du thé. — Donnez-lui du.
thé, — Il demande du thé... Et dix dames se mirent en mouvement pour servir l’idole? »,
1. Épouarp Henrior, Madame Récamier et ses amis (Paris, Plon, 1905), tome I, p. 327.
2. Mémoires de la comtesse de Boigne, publiés par M. CHarzes Nicourraun (Paris, Plon, 1909), tome I, p. 296. À vrai dire, la lecture des Abencerages que raconte Mme de Boigne n’est pas celle que fit Chateaubriand chez Mme Récamier. C’est une autre, et qu’il fit chez Mme de Ségur. Mais il n’y a ni inconvénient ni hardiesse à penser que la scène fut, dans les deux saone, la même à peu près. À