Trois amies de Chateaubriand

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de la tendresse. Et puis, il finissait ainsi : « Adieu, adieu et toujours adieu; c’est là ce dont se compose la vie ». C’est vrai qu'il avait dit, dans sa longue vie, beaucoup d’adieux. Jadis, ils ne lui étaient pas extrêmement pénibles, parce qu'ils coïncidaient, en somme, avec des bonjours. Désormais, non. Les attaches plus anciennes qu’il devait rompre lui étaient, à la rupture, plus douloureuses. Il voyait la solitude se faire autour de lui qui supportait de moins en moins facilement d’être seul,

Cependant, il n'avait pas encore fini tout à fait de voyager. À l'automne, il partit pour aller voir son vieil et cher ami Hyde de Neuville, — lami de Blanca, une quarantaine d'années plus tôt! Il passa quelques jours à Lestang. Ensuite, le 2 octobre, il écrivit à son hôte : « Me voilà aux confins de la Bretagne. Il n’y a rien, que moi, qui change dans tout cela; c’est un grand malheur, mais il n’y a rien à y faire... Nous emportons tous nos regrets avec nous. Ils sont bien profonds, je vous assure. Je voudrais bien passer ma vie avec vous... » Comme il est triste et comme il est désemparé! Naguère si jaloux de son indépendance, comme il a besoin de secours! Je voudrais bien passer ma vié avec vous. Naguère, il n’y eut pas un être au monde, ni sa femme, ni aucune femme, sage ou folle, et fût-ce Juliette Récamier, la plus belle de toutes, non, pas un être avec lequel il prit volontiers le parti ou le sérieux engagement de passer toute sa vie, Maintenant, il a trop peur de cette solitude que lui serait