Trois amies de Chateaubriand

262 TROIS AMIES DE CHATEAUBRIAND

se souvint d'Hortense, qui était loin; et il détesta cette aventure. Îl n’ignorait certainement pas Bulwer Lytton; non, Hortense était trop sincère et naïve de cœur pour le lui cacher. Il eut tout le chagrin possible.

Et Hortense revint. Alors, il admit qu’en effet une si jeune femme ne pouvait pas « embarquer sa vie sur un vieux vaisseau naufragé »… Le vieux vaisseau se résigna comme il put, bouda quelque temps, pardonna et, de nouveau, invita Hortense à diner.

Hortense fit ses conditions. Elle exigea que Chateaubriand donnât « sa parole de chevalier de SaintLouis » et s’engageât à respecter la « vertu », comme elle disait, la petite folle! — la vertu de cette amie ancienne.

Au mois de mai 1831, après avoir donné toutes ses démissions, sa démission de pair de France, sa démission de ministre d’État, après avoir résigné ses pensions, abandonné ses droits, ses privilèges, ses titres, son pain quotidien, après avoir vendu ses meubles, car il n'avait plus ni argent ni revenus, Chateaubriand, qui n’était pas fidèle en amour, mais qui l’était en politique, partit, avec Mme de Chateaubriand, pour Genève. Il s’en allait, homme d'autrefois, qu'ont chassé des ambitions nouvelles. Son départ est beau.

Mais, avant de partir, il écrivit à Hortense : « Je pars demain à la première heure. Je pars presque heureux de je ne sais quel charme qui s'attache à