Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

LA CONJURATION BRETONNE 51 comédienne. Toujours est-il qu'il s'était lié avec elle : ils vivaient ensemble à l'hôtel de la Fautrière. Or, quand, au commencement de 1790, le Châtelet ordonna des poursuites contre Marat, c'est à cet hôtel de la Fautrière que l’Anu du Peuple vint se réfugier; et, lorsque les magistrats se présentèrent pour se saisir de sa personne, le district des Cordeliers s'insurgea, protestant contre celle soi-disant violation de la liberté; même il délégua, pour porter ses doléances à l’Assemblée nationale, quatre commissaires choisis parmi les patriotes qui lui inspiraient le plus de confiance. C'étaient Paré, Danton, un moine cordelier nommé Oudolle et le docteur Chévetel. Celui-ci avait en somme joué dans cette aventure le principal rôle, puisque, profitant de l'hésitation des magistrats et de l’elfervescence de la rue, il avait aidé sa maïtresse, M'° Fleury, à faire échapper l'inculpé, cause de cette bagarre. Quand, vers le soir, les portes de l'hôtel de la Fautrière s’ouvrirent enfin devant les huissiers du Châtelet, ceux-ci ne trou-

1. Lorsque, plus tard, M'° Fleury fut arrêtée, en pleine Terreur, avec ses camarades de la Comédie-Francaise, Chévetel, qui était sur le point de l'épouser,rappela cette circonstance en faveur de sa maitresse et obtint sa mise en liberté. Le Journal de la Monlagne (1194) contient ces lignes : « La comédienne Fleury avait un litre bien précieux à la bienveillance des patriotes : elle eut le bonheur de sauver Marat, de l'arracher au poignard de l’aristocratie, à l'instant où sept mille hommes avaient envahi sa maison. »