Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

16 LE MARQUIS DE LA ROUËRIE

jour plus critique, et, vers la fin de septembre 1791, la Rouërie dépêcha vers Coblentz son cousin Tuffin!, chargé de soutirer quelque argent de ce tonneau des Danaïdes qu'était la caisse de l’'émigration. Calonne, qui continuait, comme au bon temps de son ministère, à jongler avec les millions qu'il n'avait jamais eus, réédita la scène de don Juan recevant M. Dimanche. Ah ! que de belles phrases entendit Tuffin !

Tout d'abord on lui ménagea l’agréable surprise d’un billet autographe de M. le comte de Provence, qui, depuis peu?, élait venu rejoindre son frère à Coblentz. Quand on songe avec quelle folle abnégation la Rouërie et ses Bretons se préparaient à donner leur vie pour la cause royale, la froideur et la banalité de cette lettre semblent, par contraste, presque révoltantes :

« Schôünbornlust, 4 octobre 1791.

Vous pourrez, Monsieur, assurer de ma part M. le marquis de la Rouërie qu’instruit par lecomte d'Artois du plan d'association qu'il m'a proposé pour le bien de la province de Bretagne, je n'hésite pas à joindre mon

1. Il semble, du moins, que ce fut Tuffin que la Rouërie chargea de cette mission ; mais nous n’en avons pas la certitude. Le nom de l’émissaire est, en effet, sur toutes les pièces originales, raturé de telle sorte qu'il reste illisible.

2. Le comte de Provence avait quitté Paris le 20 juin : il avait d'abord séjourné à Mons et à Bruxelles.