Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

388 APPENDICE.

« Elle est dans le pouvoir de Bonaparte, assurément, exceplé avec l'Angleterre; mais il en faut une solide, et la querre seule peut la donner telle; mais je suis sûr que l'année 1806 sera l’année climatérique de la paix établie par Bonaparte, et d’une paix sûre, parce qu'il sera impossible de la troubler. » Alors il sortit tout de suite, évitant de plus longs discours.

Lui sorti, elle me parla sur le même sujet. Mon Dieu, que je voudrais que ces rois d'Europe et mon empereur de Russie eussent pu êlre dans ma poche quand j'étais là, qu'ils pussent entendre comme on les traile tous et comme on est résolu de les enchainer! Ils verraïient, ces pauvres malheureux, comme leurs fripons de ministres les trompent,et ce que Bonaparte leur prépare. Que j'aurais voulu que cet indigne roi de Prusse, le plus bas de tous ici, qui fait, lui, plus de bassesses que les autres, enlendit comme en parlait Talleyrand à la Bonaparte et la Bonaparte à Talleyrand! Quel mépris! et de la reine, quelles sottises dégoùtantes! C’est une horreur, et croyez-vous que les ministres qui sont ici ignorent cela? Cela n'est pas possible, fussentils bêtes comme M. Gallo: mais ils ont peur de perdre leurs places. Et ne croyez-vous pas que si Bonaparte réussit à se rendre maitre de tout, il ne les punisse? Enfin ils le veulent, grand bien leur fasse! Mais si l'empereur de Russie est attrapé, ce ne sera pas votre faute, et c’est tout ce qu'il faut à votre bonheur et au mien.

X... sort de chez moi. Il est venu apporter une lelire de Berlin dont il a toujours oublié de me parler. Elle est du Le octobre, envoyée par La Jarre, secrétaire de Laforest, et adressée à Talleyrand par un monsieur qui signe La Barbeterie; il jdtte les hauts cris contre vous, sur ce que, ayant élé en Russie, il a été arrêté à Mittau et fouillé, ses papiers envoyés à Pétersbourg, des fioles qu'il portait examinées et même accusé d’êlre un empoisonneur; qu'ensuite l'empereur lui fait faire bien des excuses, lui a renvoyé ses papiers, lui disant qu'on l'avait trompé, mais qu'il eût à s’en