Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

LE MÉMOIRE SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX (1788). 53

lois et les vieux auteurs. Dans le moyen âge, période honieuse et barbare, il ne discernait qu'un héros, ltienne Marcel, et deux rois seulement, Louis XII et Henri IV, étaient épargnés dans les périodes postérieures. Contre les derniers Bourbons, il s'exprimait presque dans le style de La Vicomterie ou de tel autre pamphlétaire jacobin. « Richelieu avait courbé tous les courages, Mazarin les détruisit, et le long règne de Louis XIV acheva de gangrener toutes les âmes (1). »

Au-dessus de ce gouvernement, antérieurement à lui, a existé la constitution française. D'Antraigues, à force de lire, l’a enfin découverte. Pour la trouver, dit-il, consultez Grégoire de Tours, Aimoin, les Capitulaires ; reportez-vous aux décisions des États généraux, ces conservateurs intermittents de la chose publique, aux remontrances plus récentes des cours souveraines ; c’est là que sont les titres imprescriptibles des libertés nationales. Au doux Louis XVI s’oubliant à dire en lit de justice : « C’est légal, puisque je le veux », il faut rappeler Clotaire II déclarant ne pouvoir rien faire sans le consentement de ses leudes. De l'époque présente il faut rétrograder, politiquement parlant, à l’époque idéale, celle de Charlemagne. Cette thèse est devenue celle des publicistes de l'émigration, lorsqu'ils prétendaient opposer aux constitutions de 1791 et de l'an III l'antique, la vraie, la seule constitution française. Avant eux, d’Antraigues a. déployé au service de ce paradoxe une érudilion très variée et quelque peu confuse. Beaumanoir, Philippe Pot, Bodin, Boulainvilliers lui servent de cortège, et

(L) Mémoire sur les États généraux, p. 212. — « Il faut débourbonnaëller la France », s’écriait alors d'Esprémesnil, depuis si hostile à la Révolution.