Un diplomate d'il y a cent ans : Frédéric de Gentz (1764-1832)

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servateur. À force de demander à la raison des preuves rigoureuses, irréfutables, Gentz restreignait le champ des réformes possibles. En exigeant l'évidence pour apporter des modifications dans un domaine où rien ne peut se déduire avec une certitude mathématique, où les choses se présentent dans toute leur complexité, enveloppées de beaucoup de confusion, on risquait d’écarter des réformes, et d’apporter dans la politique une certaine rigidité qui n’est guère propice au développement harmonieux des institutions. D’autre part, en réduisant ses désirs à l'indispensable, Gentz donnait à ses revendications une force peu commune. Pour les Etats allemands, il réclamait après Austerlitz et après Téna l’indépendance sans la liberté. S'il n'avait su se modérer, et s’il avait prêché un idéal irréalisable, aurait-il pu jamais s’élever aux accents que l’on trouve dans la préface des Fragments ? Il n’y avait pas en lui l’étoffe d’un Fichte, mais il ne faut pas oublier qu’il sut tenir ce langage plus d’un an avant les Discours à la nation allemande. On se rend compte de ce que son conservatisme pouvait avoir de décevant pour les masses. À quoi bon l’indépendance sans la liberté? Mais Gentz ne voulut jamais être un conducteur de peuples, son pathos rationaliste s’adresse à une élite, à un petit nombre de lecteurs qu’il cherche à convaincre par tous les moyens,