Une mission en Vendée, 1793

NOTE PRÉLIMINAIRE. III

chent à prolonger indéfiniment la lutte; les vivres, les habits, les souliers, les munitions manquent à la fois aux troupes. Tandis que les campagnes sont en feu, la réaction envahit les villes : elle y entretient la division et la haine. D’anciens soldats vêtus en gardes nationaux, armés et payés par les adversaires de la Représentation nationale, terrorisent les populations urbaines. Quelques proscrits girondins, soutenus par des amis dévoués, parcourent le pays en prêchant le fédéralisme et la révolte. Partout l’autorité du pouvoir central est méconnue; nulle part la loi n’est obéie. Même dans les grands centres, on ignore les décrets de la Convention que la Poste, interceptée, n'apporte plus. Les municipalités sont livrées à elles-mêmes. Les bourgs, les villages, s’arment, s’approvisionnent, s'organisent à leur fantaisie et comme ils peuvent. La guerre, dans un perpétuel va-et-vient, tantôt s’éloigne d'eux, tantôt les enveloppe et les isole. Les routes sont infestées de malfaiteurs. Le tocsin sonne le jour et la nuit. Des bandes de paysans se ruent sur les maisons isolées, où de grands incendies éclatent tout à coup. Les Vendéens pillent, rançonnent, tuent là où ils passent. On ne sait jamais où est l’armée catholique et royale : elle apparait à l’improviste, soit devant une place forte, soit devant un campement républicain, sans qu’on puisse deviner d’où elle arrive. Des foules effrayées fuient devant elle, qui viennent demander asile aux représentants du peuple; les réquisitions ne produisent presque rien; la levée des conscrits est devenue à peu près impossible; les assignats n’ont pas cours; l'argent fait absolument défaut. Et pour comble de maux, les violences et les brigandages d’une poignée d'énergumènes, commandés par des amis de Carrier, anciens royalistes devenus ultra-révolutionnaires, achèvent d’épouvanter la contrée et compromettent la cause de la République.

Il faut remédier à tout cela : réorganiser la marine ; reconstituer les escadres, former nos matelots à la discipline et au respect; armer les ports; protéger les côtes menacées; mettre à la raison les généraux, et les obliger à un accord nécessaire; donner aux soldats des vêtements et des armes; tenir la