À la recherche de la fortune du duc d'Orléans (1793-1794) : lettres inédites du général Montesquiou à Francis d'Ivernois

8 REVUE HISTORIQUE DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

de sa fortune à recueillir en France, puisque la loi barbare des confiscations ne réserve pas de subsistance aux enfants. Il en serait privé d’ailleurs par son émigration. Mais il est constant, il est de notoriété publique que M. le Duc d'Orléans avait placé en Angleterre des fonds considérables, et que personne ne peut contester au fils aîné de ce prince le droit de les recueillir. On ne peut pas craindre qu’un gouvernement tel que celui de l'Angleterre veuille user de représailles envers les Francais, parce que le gouvernement monstrueux qui tyrannise la France a été fort injuste envers les Anglais qui y sont établis. La jurisprudence des représailles a toujours été regardée avec horreur, et n’a jamais été employée que comme un frein pour le crime. Or dans ce cas-ci, elle y servirait plutôt d'encouragement, puisqu’elle ne porterait que sur les victimes que l’on immole en France. D'ailleurs l'exemple qu'ont donné les Autrichiens en prenant possession de Valenciennes et en invitant les propriétaires à rentrer dans leurs droits, ne permet pas de doutes à cet égard, On ne fait donc pas au gouvernement anglais l'injure de concevoir la moindre crainte sur la liberté qu'il laissera à M. le Duc d'Orléans actuel d'exercer ses droits. Mais comment les exercera-t-il? Voilà la seule difficulté,

Il n'a jamais vécu avec son père. Il n’a été initié dans aucun de ses secrets, D'ailleurs quand il aurait su de lui avec détail ce qu'il ne sait qu'en général, il n'aurait été dépositaire d’aucun titre, et sa sortie non prévue de France, la proscription, la saisie qui a précédé de plusieurs mois la mort de son père, ont mis un obstacle invincible à ce qu’il ait pu recouvrer la moindre des pièces qui lui seraient nécessaires. Il sait seulement, comme tout le monde, que feu M. le Duc d'Orléans avait formé un établissement à Londres, que depuis dix ans il n’était occupé qu'à réaliser ce qui était libre dans sa fortune pour l’y transporter. Il sait d’une façon plus particulière