Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

L/« ÉGRILLARDE » EN FRANCE 187

mots de tyrannie et de liberté se confondent dans sa tète et prennent à ses oreilles les mèmes sons ; elle ne cherchera pas à expliquer comment dans une pareille tourmente la tyrannie est un mal nécessaire qui parfois conduit à un régime de liberté.

En résumé, le sens profond de la Révolution échappa à sa compréhension, et elle assista à la banqueroute de l'Ancien régime, sans se douter que cette banqueroute de la monarchie française allait atteindre tous les trônes. Mais elle eut parfois des éclairs de divination, et dans la mêlée de l’Europe elle euttoujours la vue juste et pratique des intérêts de la Russie et de sa gloire.

Sielle assista aux premiers exploits de celui qui allait être appelé à rétablir l’ordre social sur de nouvelles assises (1), elle ne reconnut pas en lui ce sauveur annoncé, et ne parut pas voir en ce général Bonaparte l’étoffe du Napoléon, qui après avoir, à Tilsitt, tendu la main à son petit-fils, porterait ses projets de conquête jusqu’en Russie. Elle avait prévu un Gengis-Khan mettant la France républicaine à la raison. Si elle eut véeu quelques années de plus.elle eut été stupéfaite d’apercevoir ce Gengis-Khan, né en Occident, compatriote de Paoli, et portant le fer et le feu jusque dans son Empire. (L)Onsait qu'au moment oùle Comité de salut publielui refusa son appui, en 4788, Bonaparte avait songé à offrir son épée à Catherine II, comme il fut aussi pris de l'idée de réorganiser l'armée turque. C'est quand on lui dit que limpératrice de Russie réservait ses faveurs aux royalistes et rejetterait sa demande, que Bonaparte renonça à ce dessein. Voilà un projet qui s’il eut été poursuivi, eût pu singulièrement modifier le cours de l'histoire,