Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents
NÉCKER, MIRABEAU, SÉNAC DE MEILHAN 331
épitre ; il fatiguait l’Impératrice de ses lettres et de ses avis. C’est ainsi qu'ayant eu une conversation avec le ministre du roi de Sardaigne, il avait fait part de ses impressions à la Tsarine.Celle-ei,qui n’en étaitplus à s'étonner de son peu de tact, lui avait répondu le 20juin: «Il « me paraît qu’à un prince aussi religieux qu'est le roi « de Sardaigne, vous parlez d’une manière un peu « leste des systèmes religieux. » Il fallait que le langage de Sénac eüt été bien irrévérencieux, car l'on sait ce que la Tsarine pensait des dévots qu’elle traitait de sots, quoique par politique elle eût recueilli les jésuites le jour où l’Europe ne les avait plus voulus. Sénac de Meilhan se le tint pour dit et ne répliqua pas.
Dans les derniers jours de juin 1791 Sénac de Meilhan manifesta à la Tsarine certaines inquiétudes pour la composition de son histoire. Catherine de répondre aussitôt qu’« il est très sûr que les obstacles pour écrire l’histoire < d’un pays sont grands lorsqu'on ne connait point la « langue de ce pays et que tous les matériaux doivent « être traduits; » elle l’engage done à diminuer ce trayail de préparation, etlui conseille « de faire choix de ce qu'il y a de mieux sur l'histoire de la Russie. » Puis elle lui recommandel’ouvragede Tatischefqui « a débrouillé beaucoup de choses que tout étranger est dans l’impossibilité de connaître même, » l'histoire de Russie du Prince Teherbatof qui, « quoique fort ennuyeuse, n'est pas sans mérite, » et les annales de l’histoirede la Russie au sujet desquelles elle a ordonné qu’on lui envoyät le tome V qui va paraître. Et elle conclut toujours par les mêmes craintes : « Tout étranger qui écrit sur la