Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative (1789-1792)

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l’affluence des citoyens inconnus dont il regorge. Les

ennemis de la liberté publique réclament la liberté indi-

viduelle. On veut des lois philosophiques qui ne se plient

pas aux circonstances. On attendra qu’ils aient égorgé,

incendié, puis on les citera à la Haute Cour nationale. Une police moins indulgente serait de saison.

CCXIX. — Au même. Bernay, le 21 mai 1792.

Mon frère, je vais retourner à Evreux passer quelques jours. J'irai lundi à Conches, faire la bénédiction des drapeaux et donner la confirmation. Si cette ville devient patriote dans ces circonstances, cela tiendra du miraculeux. Conches regorge d’aristocrates, comme Paris d’Autrichiens, Rouen de nobles et de prêtres contre-révolutionnaires, Evreux d’imbéciles.

Le projet de rassembler tous les prêtres non assermentés dans les chefs-lieux de département, équivaut au projet de création de 83 foyers de discorde, de fanatisme et de contre-révolution.

Si on ne purge pas Paris, il y aura quelque explosion. Même danger à Rouen, où le nombre des prêtres est de 8 ou 9,000, et celui des ci-devant nobles beaucoup plus considérable.

Vous avez d’intrépides ennemis de la tranquillité publique qui rejettent tous les moyens de la procurer. Vous avez des extravagants bien redoutables. M. Chabot veut, je crois, se faire breveter d’une place à Charenton. L’Assemblée nationale a, ce me semble, très impolitiquement accueilli M. le curé de Saint-Laurent (1).

(x) Dans la séance du 16 mai 1792, Charles-Alexandre de Moy, curé de Saint-Laurent (à Paris) et député à l’Assemblée législative, avait proposé diverses modifications à la constitution civile du clergé. On avait murmuré; la question préalable avait été adoptée. Moniteur, réimpression, t. XII, p. 408.