Correspondance diplomatique de Talleyrand. La mission de Talleyrand à Londres, en 1792 : correspondance inédite de Talleyrand avec le département des affaires étrangéres le général Biron, etc.

442 LETTRES DE TALLEYRAND

détermineront à jamais la volonté de l'Amérique pour être utile à l'Angleterre, et qui lui en donneront la possibilité.

Les observations que cette lettre renferme perdraient tout leur air de nouveauté, et seraient l’opinion générale si le gouvernement anglais n’avait pas fait depuis dix ans tout ce qu’il a pu imaginer de plus capable d’aliéner l'esprit des Américains. Des expressions de mépris, ou au moins de hauteur, dans toutes les relations politiques ; une froideur soutenue et marquée à leur ministre toutes les fois qu'il fait sa cour, froideur d'autant plus choquante que les formes pour les ministres des autres puissances sont différentes ; des délais de quinze jours, trois semaines, pour que le ministre d'Amérique obtienne une audience des ministres du Roi, etc., etc. On a ajouté à cela d'envoyer en Amérique un ministre, des consuls pris parmi les hommes connus pour avoir été opposés par eux-mêmes ou au moins par leur famille à l'indépendance. Quelle misérable administration que celle qui prend des formes de bouderie vis-à-vis d’un pays qui consomme plus de trois millions sterling de marchandises anglaises par an! L’Angleterre perdrait-elle de sa suprématie parce que le ministre d'Amérique serait passablement traité, parce que l'on n’insulterait pas le pays en y plaçant des agents d'un rang subalterne et qui n'ont d'autre mérite que de tenir à quelque famille tory? Sa supériorité serait-elle diminuée si l’on envoyait ici comme mi-

nistre un grand seigneur, jeune, et qui eût des formes