Entre slaves
LA SERBIE EN 1885 19
bliques, mêlant dans son tiroir les papiers d'État avec ses factures, nous avons des ministères, de grandes administrations, des préfets, etc. L'Europe nous accorde son crédit, à tel point même que nous lui devons plus de trois cents millions. Nous avons un chemin de fer, une Cour où l’on donne de belles fètes, une armée permanente de quinze mille hommes. :
À nous juger d’après les apparences, tout serait pour le mieux. Nous nous préparons enfin à faire une guerre pour augmenter notre territoire.
Nous sommes donc forts!
Mais il y a un revers de la médaille.
La civilisation nous a fourni son merveilleux instrument : l’instruction, mais elle a rompu notre équilibre social et moral. Nous sommes instruits, nous sommes libres, nous portons de beaux habits, mais nous végétons.
Le paysan ne veut plus que son fils travaille la terre. Sorti du collège, celui-ci considérerait comme indigne de lui de vivre des produits du sol. Il sera apprenti fonctionnaire, fonctionnaire, politicien, ministre peut-être, il habitera la ville, vivra au café et deviendra fainéant et joueur. Nos bourgeois, nos commerçants de jadis feront de leurs fils des avocats, des médecins. Ceux-ci reviendront de Paris ou de Vienne, trouveront Belgrade horrible, s’ennuieront, n'auront plus le champ assez libre pour leurs ambitions. Ils seront froissés des habitudes un peu