Entre slaves
LA SERBIE EN 1885 _ 31
sifflotaient, les autres assis en rond, une paille entre les dents, parlaient des petites affaires de leurs villages et, de temps en temps, quelques-uns se détachaient pourallerprendreunetassede café qu'un industriel vendait moyennant deux sous. C'était la buvette.
Un bruit de chevaux au dehors. L’escorte royale. On entra précipitamment dans la salle. Chacun se plaça où il put. Un silence profond régnait lorsque le roi apparut, suivi de ses officiers et de M. Garachanine. Le cortège {raversa la salle et vint prendre place sur une éstrade. Les « Jivio » éclatèrent. Le roi resta debout devant un pupitre sur lequel on avait placé le texte du discours du trône. Un pope s’avança et lut en face du roi les prières à la lueur de deux cierges. Tout le monde murmura les formules religieuses, puis Milan, dont l’uniforme écarlate paraïssait fasciner Jes yeux de ses auditeurs, s’écria d’une voix forte : « Frères! ».
La diction était nette, ferme, el le souverain conservait une physionomie sévère pleine de dignité. Tous ces braves gens l’écoutaient, la tête en avant, le regard attentif et sous leur rude peau tannée d'hommes des champs, on voyait bien qu'ils comprenaient la signification du message. C'était un emprunt de 25 millions et de nouveaux impôts. Le pourquoi, peu d’entre eux le saïsissaient au juste et l'équilibre des Balkans n'était pas assurément ce qui les préoccupait le plus, mais les politiciens, les avocats leur sxpliqueront cela à leur façon.