Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

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DE L'ÉDIT DE TOLÉRANCE JUSQU'A LA CHUÜTE DE NAPOLÉON 07

chargé d’affaires secret du Saint-Siège À Paris pendant la Révolution, prouvent que ces mêmes ultramontains, qui avaient protesté contre l'Edit de tolérance de 1787, combattirent non seulement la Constitution civile, mais la liberté des cultes. Suivant le mot d'ordre donné par le bref du pape (10 mai 1791) les curés de l’Anjou, de la Bretagne, de la Vendée et de plusieurs autres provinces, soutenus par la masse de leurs troupeaux, refusèrent le serment à la Constitution civile et l’obéissance aux lois ecclésiastiques. Le conflit devenait aigu. Comment le résoudre? Il n’y avait guère que trois solutions. Rendre aux cultes leur entière indépendance vis-àvis de l’État et supprimer tout salaire aux ministres ; ou payer et protéger tous les cultes à titre égal ; ou enfin ne reconnaître que le clergé qui prêterait serment à la Constitution civile et lui accorder à lui seul traitements, édifices et protection. La première solution, la séparation des Églises et de l'État, qui était la plus favorable à la liberté de conscience, fut préconisée alors par quelques écrivains. André Chénier s’en fit l'interprète dans une lettre adressée au Moniteur, le 22 octobre 1791: « Nous ne serons, disait-il, délivrés de l’in« fluence des fanatiques, que lorsque l’Assemblée aura laissé « chaque citoyen suivre et payer le culte qui lui plaira. » Ces trois opinions se firent jour dans la discussion qui s’ouvrit à l’Assemblée législative, le 21 octobre 1791. La première ne réunit que peu de suffrages, tant on était encore imbu de l’idée que le culte était un service public ; la deuxième eût couté trop cher, on manquait d'argent. La majorité inclinait à la troisième, mais en réduisant la formule du serment à un engagement purement civique, et insistait pour qu’on enlevät aux prêtres la tenue des registres de l’état civil, pour les confier aux municipalités. Ce dernier système eût été encore assez libéral; mais les nouvelles de la résistance armée des prêtres insermentés dans l'Anjou et la Normandie

1. V. les Mémoires de Salamon, publiés par l'abbé Bridier, 1892, et sa Correspondance avec le cardinal Zelada, publiée par le vicomte de Richemont, 1898.

Boxer-Mavry. 7