Histoire des deux conspirations du général Malet

238 HISTOIRE DES DEUX CONSPIRAITONS

horrible institution des commissions militaires et des conseils de guerre. Contradiction étrange! un homme, un misérable, commet les plus épouvantables forfaits, tue son père ou sa mère, égorge toute une famille, ilcomparaît devant un jury de citoyens qui présente toutes les garanties d’impartialité possibles; un autre homme, parfaitement honnête celui-là, et entouré de Pestime publique, prend un jour les armes pour défendre où pour revendiquer les libertés de son pays. Il a eu tort, soit ! il a violé, sinon le droit, du moins les lois établies, d'accord! Et comme il appartient à l’armée, ou qu’il a le bonheur de vivre sous le régime de l’état de siége, il est, par la plus subtile des distinctions et en vertu d’une fiction réprouvée par le bon sens, renvoyé devant ce qu’on appelle la justice militaire, c’est-à-dire devant des hommes dont il a été l'adversaire et qui sont ses ennemis; devant des magistrats improvisés, qui jugent sans l’assistance de jurés, et qui, habitués à exposer incessamment leurs jours dans les hasards des combats, n’ont d’ordinaire pour la vie humaine qu’un médiocre respect. Je le répète : il y a là de quoi confondre l’imagination. Et devant les arrêts trop souvent meurtriers de ces commissions sanglantes, le philosophe ne peut s'empêcher de s’écrier : Pauvre justice humaine, que de crimes on