Histoire des deux conspirations du général Malet

DU GÉNÉRAL MALET 24

Je comprends qu'on voyant passer, fières et souriantes dans leurs équipages somptueux, les princesses frelatées de l’époque, les femmes des hauts dignitaires de lempire, oui, je comprends que, à la vue de tout ce monde de parvenus sans vergogne, de fonctionnaires civils et militaires, de fournisseurs des armées, d’acquéreurs de biens nationaux, de toute cette valetaille impériale, galonnée sur toutes les coutures, insolente et repue, gorgée, faisant ripaille et se hâtant de jouir, comme si elle eût senti que l’orgie ne devait pas être de longue durée, ah! je comprends, dis-je, que Phomme des faubourgs se soit senti mordu au cœur par une secrète envie. Îl avait pris et démoli la Bastille; il avait enduré vaillamment la faim et le froid pour le triomphe des droits de l’homme, il avait avec Santerre combattu la chouannerie en Vendée, et avec Marceau, Hoche et Jourdan, les émigrés sur le Rhin, tout cela pour qu'un aventurier corse reconstruisit à son profit le trône broyé dans la journée du 10 août, et qu’une armée de parasites s’abattit sur le pays comme une nuée de sauterelles. Oh! oui, je comprends sa secrète envie et l’amertume de ses regrets !

Mais, dira-t-on, la France jouissait du moins d’une tranquillité parfaite à l'intérieur. Oui, elle avait