La caricature anglaise au temps de la Révolution française et de Napoléon

510 BIBLIOTHÈQUE UNIVERSELLE

A

Bonaparte, Rowlandson s'élève à une hauteur presque shakespearienne. Assis sur un tambour, le vaincu de Leipzig cause avec la terrible faucheuse assise en face de lui sur un canon, et une interminable perspective de victimes commente le lugubre tête-à-tête. « La plume, dit très bien Champfleury, est insuffisante à montrer le parti qu'a tiré l'artiste anglais de son thème. C’est le regard de la mort qu'il faut voir entrer dans le regard du conquérant soucieux. pendant qu'au loin se font entendre des plaintes de mourants, et plus loin encore des pleurs de mères, et plus loin encore les sanglots de la France.» Bien inférieur me paraît un dessin anonyme où les souverains de l'Europe s'amusent à berner leur ennemi sur la couverture dont se servaient les muletiers pour berner Sancho Pança. Aïlleurs, le comique se mêle au tragique sans jamais le faire oublier. On nous amuse un instant avec la revision des remplaçants pour la milice; mais, quand nous voyons ces bossus, ces bancals, ces maigrichons, auxquels les puissances militaires sont réduites pour remplir leurs cadres, nous pensons aux jeunes gens vigoureux qui dorment sous les neiges, ou sur les champs brülés de la Castille. Elle nous amuse, la « presse » du quaker, lorsque ce pieux ennemi de

J'ivrognerie et du métier des armes est entraîné par un

moment de faiblesse, par les charmes de deux gaillardes

* apostées, vers la maison fatale où on lui fera perdre la :,; raison. et signer son engagement; mais nous n'avons plus He envie de rire quand un matelot pleure en se séparant de "sû petite famille.

Quand Napoléon est à l'ile d'Elbe, Cruikshank lui sert une histoire rétrospective de sa vie, sans générosité, sans convenance et même sans justice. Autrefois, Gillray avait accusé Bonaparte et Joséphine de complaisance