La correspondance de Marat

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avantages que la fortune semblait se plaire à vous prodiguer ? La gloire d’elle-même s’attachait à vos pas; de faux bruits, venus de contrées lointaines, avaient fait de vous un héros qui avait franchi les mers pour rompre les fers d’un peuple dont il connaissait à peine le nom; bientôt vos eré-

_dules concitoyens virent en vous le défenseur de leur liberté; mille voix trompeuses prenaient plaisir à relever à leurs yeux l’éclat de vos fausses vertus; ils vont au-devant de leurs fers, et leurs acclamations vous proclament chef de l’armée parisienne. Dès lors, les destinées de la France étaient dans vos mains. Ariné de la force publique, vous pouviez être l’inaltérable appui de la liberté, la terreur des ennemis” de la révolution, l’ange tutélaire de 23 millions d'hommes. Fut-il jamais un si beau destin? Qu'aurait été la gloire de Titus et de Trajan à côté de la vôtre ? Mais il fallait aimer la patrie. Qu’avez-vous fait pour elle? Loin d'épouser sa cause, toujours on vous vit figurer parmi ses mortels ennemis. Ame de boue, la fortune avait tout fait pour vous, les Dieux étaient jaloux de vos destinées; mais, au bonheur d’être le sauveur de la France, vous avez préféré le rôle déshonorant de petit ambitieux, d’avide courtisan, de tripoteur perfide, et, pour comble d'horreur, de vil suppôt du despote.

LXVI LETTRE AU CITOYEN HEINTZLER (Novembre 1790)

Dans le numéro 272 de L’Ami du Peuple, Marat avait raconté les malheurs d’un facteur de clavecins, nommé Heintzler, dont

1. L'idée seule de votre vertu aurait fait trembler les conspirateurs, et aurait contenu tous les conjurés dans le devoir. (Note de Marat)