La correspondance de Marat
LA CORRESPONDANCE DE MARAT 187
raient bientôt plus que pour ces lieux communs dont vos prédécesseurs couvraient leur déloyale hypocrisie L'épreuve à laquelle le publie vous appelle aujourd’hui par ma voix est douloureuse; mais il attend de vous en voir sortir avec honneur. Si vous reculez, votre procès est tout fait : bientôt, poursuivi comme ennemi de la nation par les écrivains patriotes, vous tomberez dans Île mépris et votre règne n'aura duré qu'un jour.
LXVIII
LETTRE A DUPORT-DU-TERTRE ‘ (Décembre 1790)
Seconde lettre de Marat, l'Ami du Peuple, à Duport-du-Tertre, garde des sceaux de France.
L'hypocrisie, Monsieur, est le vice caractéristique de tous les fonctionnaires publics, depuis le monarque jusqu'à l'huissier. C’est sous le masque du devoir, de l'amour de la justice et de la bienfaisance, qu'ils violent les lois, qu’ils exercent leurs brigandages, qu'ils égorgent les peuples. Il n'y a pas jusqu'au plus affreux tyran qui ne se couvre de ce masque, en faisant couler le sang pour assouvir ses passions féroces ou brutales ; tant est vrai que toute autorité doit avoir pour but le bien général: vérité à laquelle les despotes eux-mêmes sont forcés de rendre hommage, lors même qu'ils font tout pour l'oublier.
Vous avez débuté, Monsieur, comme tous vos prédécesseurs, en affichant de beaux adages : les badauds, qu s’engouent du premier venu sur quelques jolies phrases,
1. L'Ami du Peuple, n° 302 (lundi 6 décembre 1790).