La patrie Serbe

PAGE LA PATRIÉ SERBE

lerie, cherchaient timidement à remonter la vallée du Vardar.

Le Grand Quartier Général annonçait régulièrement dans son ordre du jour, une prochaine intervention. Croyait-il à la vérité de ce mirage ? Les premiers jours, il dut avoir la foi et sa déception n'en fut sans doute que plus horrible. Pourtant cette garantie d'un efficace soutient devint la manne alimentant le moral de l'armée, laissée à ses propres moyens ; elle fouetta les courages et permit de mener jusquà sa lin ce chef-d'œuvre d'énergie et d'abnégation que fut la retraite. Un stimulant plus puissant encore fut la royale présence de Pierre Ier. Le Roi touchait les limites de ses forces, reculées par sa volonté; malgré cela il contraignit sans cesse sa surhumaine énergie à faire davantage; il parut \ alors posséder le don d'ubiquité. lei, il ranimait une faiblesse ; là, il ralliaif des régiments ; ailleurs, il examinait des-canons, visitait des tranchées, indiquait nervéeusement de sa canne la direction exacte de l’ennemi. Hissé à cheval par ses olliciers, il allait parmi ses soldats. Lorsque le désespoir, plus encore que la douleur physique, eut achevé de briser son corps, il monta sur un caisson dartillerie et, les yeux Üxés sur les lointains incolores, s’abandonna au pas trainant des bœuis, qui, lentement, très lentement, avançaient doucement, comme s'ils relusaient d’emporter le souverain hors de la Patrie Serbe :

Quatre bœufs dont le joug est d'un sombre archaïsme L’arrachent à son sol comme un soe d héroïsme. C’est un vieillard ; mais lorsqu'il faut, Lorsqu'il faut arracher malgré sa haute taille Un Karageorgevitch à des champs de bataille Quatre bœufs ne sont pas de trop (1)

1, Edmond Rostand: Les quatre bœufs du Roi Pierre,