La patrie Serbe

LA PATPRIE SERBE 254

Les soldats s’enlisèrent, aspirés par le sol mouvant quiles retenait et les absorbait.

On mit de quatre à six jours pour faire le courttrajet d' Alessio à Durazzo. Huit à dix jours furent nécessaires pour aller de Durazzo aux environs de Vallona—je spécifie «les environs » : la ville de Vallona était consignée aux soldats exténués. 1e

Certains épisodes douloureux doivent, par amitié pour une nation alliée, être laissés dans les ténèbres.

Cette randonnée de Durazzo à Vallona fut affreuse. Les Serbes marchaient sans espoir. Ils n'avaient plus conscience d'eux-mêmes ; l’espritennuagé par lesbrumes de la misère, ils allaient à l'aventure. Des guides les conduisaient vers les redoutables marais, puis leur juraient qu'ils ne pourraient passer.

Le retour en arrière était impossible, les Autrichiens talonnaient l'armée, gardée par la division de la Drina (LI: ban). Cette division placée en arrière, reculait en combattant depuis la frontière serbe.

Les hommes mouraient comme des mouches d'automne. {l a été raconté qu'ils avaient le typhus, le choléra. Us navaient que de l'épuisement, Un épisode, choisi parmi les milliers d'incidents qui forment cette catastrophe, dépeindra un peu tant d’horreurs : Un officier rencontra un Îeu auprès duquel gisaient trois cadavres, le feu consumait une partie des corps. À côté. restait un vivant déjà au seuil de la porte ouverte sur le mystère de l’Au-delà. Apercevant des compagnons de souffrance, le moribond tendait une main qu il pouvait à peine soulever ef un gémissement traversait ses lèvres. L'officier descendit de cheval ct posa sur la bouche incolore un peu de sucre imbibé de cordial. Le soldat prononca : « Merci frère » et franchit le seuil de l'Etcrnité.

17