La première histoire des guerres de la Vendée : essais historiques et politiques sur la Vendée du Chevalier de Solilhac

172 LA PREMIÈRE HISTOIRE DES GUERRES DE LA VENDÉE

donner ses foyers. Les districts du païs profitèrent de ces dispositions pour tirer d’eux des sommes considérables et leur déclarèrent ensuite qu'il fallait se soumettre au décret et que la gendarmerie saurait bien faire marcher les plus mutins (1). Quatelino, d’une condition obscure, mais plein de piété et qui joignait au jugement le plus sain un courage et une force d'âme extraordinaire (2), secondé par Stofflet, simple gardechasse, profita de cette occasion pour arracher son païs à la tirannie affreuse qui l’accablait. Il rassemble pendant la nuit les païsans dans une lande, leur peint Dieu outragé, le Roi détrôné et trainé au dernier supplice ; il leur montre la honte des fers dont ils sont accablés; enfin il les pénètre du feu dont il est animé et leur fait jurer sur la croix de mourir jusqu’au dernier plustôt que d’obéir plus longtemps à leurs cruels tirans (3). Différentes insurrections se manifestent dans différents cantons, et bientôt Montaigu, Saint-Florent, Léger, Bressuire, sont au pouvoir des Royalistes. C’est dans cette dernière ville que M. de l'Escure fut délivré, M. de l’Escure, qui depuis a figuré à la tête de l’armée et qui-est aujourd’hui l’objet de ses regrets (4). Alors Quatelino proposa aux païsans d’aller offrir à M. d’'Elbée le commandement de l’armée. Après quelques difficultés de sa part sur ce qu’il ne connaissait pas la résolution ferme et decidée des Païsans, il accepta le commandement à condition que M. de Beauchamps en ferait autant (5).

(1) La levée de 300.000 hommes ne fut que la cause occasionnelle de l’insurrection. Solilkac ajoute au mécontentement du peuple une cause que personne n'avait signalée encore : la canaillerie dès districts, qui avaient battu cyniquement monnaie sur la crédulité de leurs administrés.

(2) Bel éloge de Cathelineau. Ce témoignage seul suffirait à prouver qu’il a été un des promoteurs de l'insurrection et à ruiner la thèse de M. C. Port dans la Légende de Cathelineau

(3) Cette réunion, ou ces réunions nocturnes dans une lande, sont un fait nouveau. Il est évident que Solilhac se fait ici l'écho d’un fait publie, connu de toute l’armée.

(4) Solilhac anticipe un peu sur les faits, mais pour revenir bien vite aux événements des premiers jours. Ce bel éloge, si mérité, de M. de Lescure prouve quelle impartialité anime les jugements de Solilhac, lorsqu'il mêlera, comme nous le verrons bientôt, la critique à la louange avec une entière liberté de plume.

(5)La démarche de Cathelineau auprès de d'Elbée est confirmée presque dans les mêmes termes dans les Mémoires de l'abbé Chevalier. (Voir Autour des